Dans ce quatrième post sur mon Substack, j’aborde le rôle du manager face aux évolutions de la société et en particulier les questions de l’inclusion et de la diversité.
Lorsque Peter Kern a pris la direction du Groupe Expedia en 2020, l’une de ses premières décisions a été de nommer un Chief Inclusion and Diversity Officer pour monter le département en charge des questions d’inclusion et de diversité.
Au départ, j’étais un peu dubitatif face à cette initiative, d’autant que certains sujets mis en avant, tel que la cause des latinos ou celle des vétérans, avaient peu de resonance en Europe. Mais après quelques années, j’ai pu me rendre compte de l’impact de cette décision. Des sujets tel que la place des femmes en entreprise, la représentation LGBT, ou encore la gestion des personnes en situation de handicap, ont été largement mis en avant, au niveau RH mais aussi via l’investissement direct de nombreux employés, dont plusieurs de mes anciens collègues.
Si je suis resté observateur à l'époque, ce post est l'occasion pour moi d'en parler, car je suis aujourd'hui convaincu de l'importance de ces sujets de société dans le rôle du manager et plus globalement dans la culture d'une entreprise, facteur capital de sa réussite. Alors bien sûr, tous les aspects de l’inclusion et de la diversité méritent qu’on en parle, mais je n’ai pas la possibilité de le faire ici. Je vais donc en aborder deux, avec un angle très personnel et concret.

Multi-genres
Alors que je réfléchissais à la rédaction de ce post, je suis tombé sur cet article du site eurosport.fr dans lequel des skieurs pros racontent comment la rencontre d’une femme a été un déclic dans leur carrière, avec à la clé un bond en avant dans leurs performances. Si je suis bon skieur, je ne suis pas professionnel, en tout cas pas de ski. Néanmoins, j’ai moi aussi rencontré une femme qui a joué un rôle majeur dans ma progression de carrière.
Coïncidence de la vie, c’est lors de ma toute première semaine à Traveldoo en mai 2015 que j’ai croisé la route de Célia. Durant les huit années que j’ai passé dans cette entreprise, nous avons vécu ensemble les étapes de jeune couple, puis de jeunes mariés, et enfin de jeunes parents. Son apport a été fondamental dans mon évolution en tant que personne, pas seulement pour l’aspect sentimental, mais aussi parce que Célia est une femme. En effet, j’ai vécu toute ma jeunesse dans un monde très masculin : je suis issu d’une fratrie de trois garçons, ma promotion en IUT d’informatique était composée de 110 hommes pour 10 femmes, quasiment tous mes amis et premiers collègues étaient des hommes.
L’arrivée d’une femme au cœur de ma vie a changé beaucoup de choses dans ma façon de gérer les sentiments, de discuter de mes émotions et de collaborer en binôme. Tout ceci m’a particulièrement aidé dans ma progression vers le rôle de manager, qui demande une forte composante humaine. Alors il serait vain de souhaiter à chacun de rencontrer l’âme sœur pour faire progresser sa carrière. En revanche, je peux souhaiter que les femmes soient plus représentées dans les métiers Tech, lieu de naissance de la déplorable bro culture.
À Traveldoo, j’ai eu la chance de travailler avec de plus en plus de femmes au fil des ans. Ces femmes, qui se reconnaitront si elles me lisent, m’ont également beaucoup apporté dans ma progression de manager simplement par les discussions que j’ai pu avoir avec elles, leurs différences de points de vue, leurs encouragement, et aussi par ces quelques fois où elles n’ont pas hésité à me remettre à ma place. J’ai parfois été un peu désarçonné, je n’ai pas toujours été parfait, j’ai encore certaines idées-reçues difficiles à effacer, mais je suis aujourd’hui convaincu qu’il faut une meilleure parité, un meilleur équilibre homme/femme, pour qu’une équipe - et plus largement une organisation - exprime son plein potentiel.
Le manager est absolument essentiel dans cela, ne serait-ce que par son rôle dans le recrutement et la rétention des employés. Mais il faut aller au delà, ne pas hésiter à prendre la parole et à agir face à des comportements inappropriés ou à des différences de traitement. Enfin, il faut soutenir ces femmes qui évoluent dans un monde très masculin et pas toujours très bienveillant, même si je veux croire que les choses évoluent dans le bon sens.

Multi-culturel
Un autre sujet central de l’inclusion et de la diversité est celui de l’acceptation et l’intégration de toutes les minorités ethniques et culturelles. Je pense essentiel que chaque individu et chaque entreprise milite contre le racisme et l’extrêmisme, à son niveau et avec ses moyens, comme le disait si bien Jacques Chirac.
J’ai la chance d’avoir grandi dans un quartier relativement populaire de Paris (proche de la Porte d’Orléans) dans lequel j’ai côtoyé toute ma jeunesse des camarades et amis aux origines diverses. Cette diversité m’a énormément apporté en tant que personne. On dit souvent qu’il faut voyager pour découvrir le monde, mais lorsqu’on habite une ville comme Paris, il suffit de s’intéresser aux autres (ou plutôt “à l’autre”) pour découvrir une richesse culturelle rare. J’ai gardé cet intérêt naturel lors de mon arrivée dans le monde professionnel, en tant que membre d’équipe puis en tant que manager.
Durant les trois dernières années, au sein des petites équipes que j’ai géré, j’ai pu en apprendre d’avantage sur mes collègues aux origines polonaise, vietnamienne, tunisienne, marocaine, indienne, comorienne ou encore chinoise. Cette diversité culturelle, auquel il faut aussi ajouter les différentes origines régionales françaises et européennes, est un atout dans une équipe car elle incite à l’échange, à la curiosité et à l’acceptation des différences. Elle permet un climat de collaboration plus sain qui a des répercussions sur le travail d’équipe et la productivité. J’ai cette conviction naturellement ancrée en moi, et je pourrais en parler d’avantage, mais je vais plutôt aborder un corollaire très concret de cette richesse culturelle : la question de la langue.
Lorsque j’ai commencé à travailler dans les années 2000, la langue utilisée dans l’informatique en France était le français. Avec l’explosion des GAFAM américains et plus globalement la révolution numérique, l’anglais s’impose de plus en plus. Les technologies sont devenues américaines1 et la facilité de communication a entraîné une mondialisation des entreprises. A tel point que parfois, l’anglais est devenu la langue courante dans des bureaux basés en France et que sa bonne maîtrise est devenue indispensable, ce qui pose à mon sens des problèmes d’inclusion, peut-être même de légalité.
J’ai vu des collègues, très bavards et intéressant en français, devenir très discrets lors de réunions en anglais car peu à l’aise avec cette langue. Surtout, j’ai une admiration totale pour ces personnes aux origines diverses dont je viens de parler, arrivées en France récemment, qui doivent parler anglais et français au quotidien alors que ni l’une, ni l’autre, n’est leur langue natale. Le sujet n’est pas simple, il y a d’un côté le besoin d’une langue d’échange internationale qui est l’anglais, favorisant l’inclusion multi-culturelle, et de l’autre la langue légitime que l’on parle en France, avec une frontière de plus en plus friable entre ce qui relève de l’échange international et de l’échange local. Il n’y a pas réponse absolue, tout va dépendre du contexte, mais le manager doit agir comme facilitateur pour que chacun se sente le plus à l’aise possible pour s’exprimer.
En tout cas, un changement positif est peut être en marche avec l’évolution de l’IA générative qui va améliorer substantiellement les traductions automatiques, que ce soit écrites ou orales. Alors bien sûr, cela ne remplacera jamais la discussion en direct, mais si la majorité des contenus “formels” sont facilement traduisibles dans toutes les langues, les perspectives sont grandes pour améliorer l’inclusion à tous les niveaux. Si vous êtes curieux, jetez un coup d’oeil à cette vidéo sur la fabrication des beignets qui doit normalement se lancer directement en français avec une traduction automatique faite par IA, alors que la version originale est en anglais. Le résultat n’est pas encore parfait, mais c’est suffisant pour largement atténuer l’effet robot des traducteurs classiques. Et ce n’est que le début2.

Ce Substack éphémère devrait s’arrêter là, mais j’ai préparé un dernier paragraphe sur un sujet lié à l’inclusion et la diversité, que je publierai dans un post bonus la semaine prochaine intitulé “La créativité au travail”.
Le grand public ignore à quel point tout site web ou application moderne utilise un grand nombre de technologies issues de Google, Facebook, Microsoft ou Amazon, en plus de l’open source. L’IA générative (formalisée par Google) en est un nouvel exemple.